La mésinformation et la désinformation ne sont pas seulement un problème au Canada

L’accès à l’information et à l’éducation en matière de sexualité et de santé sexuelle est essentiel pour que chaque personne, où qu’elle vive, puisse protéger sa santé et prendre des décisions éclairées sur sa vie sexuelle et génésique. Pourtant, trop de personnes de tous âges ne reçoivent même pas l’éducation sexuelle la plus élémentaire; et les informations erronées sur la sexualité et la santé sexuelle sont bien trop répandues.

Savoir où trouver des informations exactes et dignes de confiance, sur la santé sexuelle et génésique, n’est pas seulement un problème au Canada. Partout dans le monde, les gens ont le droit de recevoir ces informations, mais ont souvent du mal à y arriver. Voici les difficultés et des pistes de solutions.

Quelle est la différence entre mésinformation et désinformation?

La mésinformation est une information qui peut être accidentellement incorrecte ou trompeuse. Les faits sont faux, mais il n’y a pas nécessairement une intention de tromper. Il peut s’agir de données qui ne sont pas à jour, de fausses rumeurs ou de souvenirs déformés, partagés par des ami-es. La pornographie peut être un exemple de mésinformation sur la sexualité et la santé sexuelle, car elle n’est pas destinée à éduquer, mais beaucoup de personnes la considèrent comme un moyen d’apprendre des choses sur le sexe.

La désinformation, quant à elle, est le partage d’informations dans le but de manipuler des gens. Il peut s’agir de partager consciemment des informations incorrectes, d’utiliser des sources qui sont partiales, de manipuler des faits ou de créer des histoires trompeuses. Une autre façon de répandre la désinformation consiste à créer et à partager des histoires sensationnelles, surchargées d’émotion ou complètement inventées, pour attirer l’attention des gens. Pour ce qui concerne le genre, la sexualité et la santé sexuelle, l’utilisation de fausses informations pour mobiliser des appuis à une cause peut être particulièrement courante dans des groupes anti-avortement ou anti-2SLGBTQ+.

La censure est un autre obstacle qui peut nous priver d’informations dont on a besoin. On dit qu’il y a censure lorsque des personnes qui sont au pouvoir (p. ex., gouvernements, entreprises de médias). agissent de manière à effacer certains types d’informations ou à les rendre inaccessibles.

La mésinformation et la désinformation en ligne

Les plateformes de médias sociaux, comme Facebook, Twitter, WhatsApp, Google et YouTube, peuvent être d’excellents outils pour accéder à des informations exactes et fiables sur la santé sexuelle, pour les partager, et pour relier des personnes du monde entier. Mais elles peuvent également contribuer à la désinformation et à la diffusion de mésinformation. Et, puisque la mésinformation et la désinformation suscitent tellement d’engagement (pensont aux pièges à clics, aux réactions très fortes de personnes dans les médias sociaux, et aux vagues d’indignation), les entreprises et les algorithmes sont encouragés à les diffuser davantage, car l’engagement augmente les revenus publicitaires. Sachant cela, certains groupes ont appris à exploiter les médias sociaux pour faire circuler des messages anti-avortement et opposés à l’éducation sexuelle complète.

Un rapport de l’organisme Privacy International, intitulé « A documentation of data exploitation in sexual and reproductive rights », présente plusieurs exemples de l’utilisation des médias sociaux pour faire circuler des éléments de mésinformation et de désinformation. En voici quelques-uns :

  • Plus d’un million d’euros ont été dépensés en publicités antichoix dans Facebook, pendant le référendum de l’Irlande sur l’avortement – certaines publicités provenant de groupes établis au Royaume-Uni, en Hongrie et dans « d’autres pays non identifiés ».
  • Google a fourni « des dizaines de milliers de dollars en publicité gratuite » à un réseau étatsunien anti-avortement et anti-contraception, formé de centres de crise de grossesse.
  • Des groupes ultraconservateurs utilisent des outils de sondage en ligne pour partager de la désinformation sur des projets de loi de divers pays, par exemple concernant l’identité de genre au Chili ou l’accès à des services de santé génésique au Kenya.


La littératie médiatique (la « compréhension des médias », en quelque sorte) peut être très utile pour repérer des ressources dignes de confiance, qui méritent notre attention, et pour démasquer celles qu’on devrait ignorer. Pour en savoir plus sur la littératie médiatique et la santé sexuelle, consulte notre entretien avec HabiloMédias!

La mésinformation et la désinformation de la part de gouvernements

Les gouvernements ont un grand rôle à jouer pour que les gens aient accès à des informations exactes sur la santé sexuelle. Les décisions des politicien-nes et des décideur(-euse)s, à tous les échelons, ont une influence importante sur ce qu’on nous enseigne ou sur les informations qu’on peut trouver. Selon le type de gouvernement du pays où l’on vit, l’information limitée et/ou la désinformation concernant la santé sexuelle peuvent être ce qu’on connaît depuis notre naissance – et la situation peut changer du jour au lendemain avec l’arrivée au pouvoir d’un nouveau parti ou groupe politique.

L’influence des gouvernements peut ressembler à ceci :

  • Des secteurs de la santé et/ou de l’éducation non financés ou trop peu financés, ce qui les place souvent en état de crise et rend plus difficile de consacrer du temps et des ressources à l’éducation ou aux services en matière de santé sexuelle, car tout est urgent.
  • Adoption de lois ou politiques qui ont un impact sur des choses comme l’accès à Internet, les programmes scolaires, les bibliothèques ou les types de documents que les gens sont autorisés à publier ou à lire dans les médias. Cela peut censurer des informations utiles et aider la désinformation à prendre plus de place.
  • Partage de désinformation sur le genre, la sexualité et la santé sexuelle, par des responsables gouvernementaux, des partis politiques ou des ressources et sites Internet gouvernementaux, pour rallier des soutiens et imposer des points de vue au public.

En voici quelques exemples réels :

  • En Indonésie, le ministère des Communications filtre et bloque les contenus en ligne, en particulier les sites Web qui parlent d’allaitement, de droits des personnes 2SLGBTQ+, et ceux qui parlent de soins et services télémédicaux concernant l’avortement.
  • En Hongrie, la communication officielle du gouvernement est devenue de plus en plus hostile à l’égard des personnes LGBTQ+ en particulier, ainsi que des femmes et des personnes ou organismes qui défendent les droits de communautés marginalisées; il diffuse publiquement des mythes et des histoires choisies pour provoquer.
  • Au Mozambique, le ministère de l’Éducation a retiré un manuel scolaire d’éducation sexuelle en 7e année parce qu’il contenait des informations complètes.
  • Aux États-Unis, le gouverneur de la Floride a fait passer une loi qui interdit de parler d’orientation sexuelle et d’identité de genre à l’école, de la maternelle à la troisième année (alors que ces sujets ne font déjà pas partie des normes de l’État pour ces classes).

Ces types de lois et d’actions créent des obstacles à l’accès à l’information et peuvent encourager les personnes qui ont des positions antichoix, anti-2SLGTBQI+ et antisexe à perpétuer la violence ciblée (physique et autre) contre les personnes qui représentent (réellement ou en apparence) ces valeurs et ces communautés.

Des gens combattent la mésinformation et la désinformation

La bonne nouvelle est que de nombreux groupes prennent au sérieux le problème de la mésinformation et de la désinformation. Cette année, au Conseil des droits de l’homme, les Nations Unies ont adopté une résolution sur la « désinformation », soulignant le rôle que les gouvernements devraient jouer dans la lutte contre les faux récits, et les incitant à agir. L’UNESCO a récemment publié un rapport intitulé Balancing Act: Countering Digital Disinformation while respecting Freedom of Expression qui suggère la collaboration entre les gouvernements et des organismes non gouvernementaux pour améliorer la littératie médiatique et l’information ciblant les groupes potentiellement vulnérables; et qui recommande de soutenir des perspectives adaptées au genre afin de répondre à la désinformation.

Il existe également des organismes à but non lucratif et des groupes de la base qui font un excellent travail, dans le monde, pour créer, promouvoir et distribuer des informations exactes et fiables sur la santé sexuelle. En voici quelques-uns :

  • Afrocolectiva est un collectif international qui travaille pour rendre largement accessible un contenu antiraciste intersectionnel, concernant l’avortement et la santé mentale.
  • La Youth Coalition for Sexual and Reproductive Rights publie The Watchdog depuis 1999, un bulletin entièrement écrit par des jeunes et qui porte sur des thèmes importants de la santé sexuelle.
  • Au Timor-Leste, l’appli Reprodutiva aide les jeunes femmes à trouver de l’information sur la santé sexuelle et génésique, dans un espace en ligne qui est confidentiel et sécuritaire.
  • Youth RISE est un organisme international qui s’adresse aux jeunes pour les inciter à faire du plaidoyer dans une perspective de réduction des méfaits sur un éventail de problématiques; qui traite de sujets comme le phénomène des rapports sexuels sous l’effet de drogues (« chemsex »); et qui partage des ressources à l’intention des travailleuse(-eur)s du sexe.
  • SocialTIC est un groupe de l’Amérique latine qui se concentre sur le changement social et le plaidoyer au moyen de technologies et données numériques; il crée et offre des ressources pour la prévention de la désinformation et des campagnes de dénigrement ainsi que pour y répondre; l’une d’entre elles, sur Instagram, concerne spécifiquement l’avortement.
  • Online Abortion Resource Squad (OARS) est un organisme qui travaille pour rendre accessibles des informations exactes et habilitantes, concernant l’avortement, dans des forums en ligne.

Y a-t-il d’autres projets, dans le monde, que tu aimerais nous recommander? Fais-nous signe! Nous avons toutes et tous une responsabilité de promouvoir et de partager des informations exactes et inclusives sur la santé sexuelle, et ceci est un excellent point de départ!

Source :

https://www.undp.org/sites/g/files/zskgke326/files/2021-06/UNDP-Information-Asymmetries-in-the-Digital-Sexual-and-Reproductive-Health-Space-EN.pdf

 

 

Mis à jour le 2024-04-02
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