Sommaire de l'élection 2019 : « On nous a promis des droits sexuels – chose promise, chose due! »

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Au lendemain de la 43e élection générale, notre mouvement a plusieurs raisons de célébrer.  

Tout au long de la campagne électorale, nous avons milité ardemment pour les enjeux liés à la santé et aux droits sexuels et génésiques (SDSG) auprès des chefs de partis, des candidat-es et des électeurs et électrices. Nous avons vu nos messages partagés et cités par les médias, les partis et les candidat-es à l’élection – dont plusieurs sont à présent bien placé-es pour respecter leurs engagements. De l’accès à l’avortement au Nouveau-Brunswick jusqu’à la décriminalisation du travail du sexe, nous avons conduit des décideur(-euse)s à formuler des promesses officielles. Vous trouverez ci-dessous un sommaire des divers engagements, promesses et objectifs affirmés au cours de la campagne électorale de 2019.

Il incombe à présent à chacun-e d’entre nous de faire en sorte que le gouvernement respecte ses engagements pour que chaque individu ait accès à une gamme complète d’informations et de services de santé sexuelle et génésique, au Canada et dans le monde.

Nous vous remercions de votre soutien tout au long de la campagne électorale. Nous n’aurions pas pu en faire autant sans vous. 

Le Parlement que nous avons élu : un gouvernement libéral minoritaire

Les gouvernements minoritaires peuvent être très excitants! Habituellement, lorsqu’un gouvernement dépend de l’appui de l’opposition pour rester au pouvoir, cela donne lieu à des compromis et à la coopération – ce qui conduit à des lois et politiques que l’on ne verrait pas avec un gouvernement majoritaire.

Un gouvernement minoritaire est souvent une bonne nouvelle pour les député-es de l’opposition, et cela veut dire que nous pourrons inciter les partis à prioriser la santé et les droits sexuels et génésiques. Avec un appui multipartite, nous pourrons hisser les droits sexuels à l’ordre du jour du nouveau gouvernement.

Mais il est important que les militant-es, les activistes et les intervenant-es de première ligne en santé sexuelle veillent à ce que les parlementaires tiennent leurs promesses électorales – en rencontrant les député-es nouvellement élu-es, en leur demandant ce qu’ils et elles feront pour la SDSG et en surveillant leurs progrès.

Leurs promesses et nos besoins

Accès à l’avortement :

Le droit à l’avortement est, de loin, l’enjeu féministe ayant suscité le plus de discussions et de débats pendant la campagne électorale.

La discussion a commencé par un ping-pong distrayant, à savoir qui rouvrirait ou non le « débat sur l’avortement », mais elle a pris un virage plus sérieux avec l’annonce de la fermeture imminente de la seule clinique d’avortement indépendante au Nouveau-Brunswick.

La clinique 554 fermera ses portes parce que le Gouvernement du Nouveau-Brunswick refuse de payer les avortements pratiqués hors hôpitaux – même si cela constitue une violation de la Loi canadienne sur la santé. Devant la vague de protestations du public et l’attention des médias, la conversation s’est soudainement tournée vers le problème très réel que rencontrent des milliers de personnes, au Canada : le manque d’accès à l’avortement.

Nous avons obtenu l’engagement de trois des cinq principaux partis politiques (soit le Parti libéral, le NPD et le Parti vert) à agir pour l’accès à l’avortement. Les chefs de ces trois partis se sont engagé-es à intervenir de manière urgente pour faire appliquer la Loi canadienne au Nouveau-Brunswick.

Ceci pourrait donner lieu à l’action la plus vigoureuse en matière d’avortement depuis 30 ans – mais nous devons maintenir la pression. Abonnez-vous à notre campagne #Committoresist pour être au courant de nos plus récentes actions pour défendre l’accès à l’avortement au Canada – et la première étape consiste à répondre à la crise au Nouveau-Brunswick.   

Leadership mondial pour la SDSG :

Malheureusement, le rôle du Canada dans le monde n’a pratiquement pas été abordé pendant la campagne – mais certains partis ont fait des déclarations marquantes.  

Le Parti conservateur s’est engagé, s’il était élu, à réduire de 25 % l’aide canadienne au développement pour les « pays à revenu plus élevé ou régimes hostiles », ce que le directeur général d’Action Canada, Sandeep Prasad, a qualifié de « tentative d’équilibrer le budget aux dépens des pauvres de ce monde ». Les conservateurs ont toutefois soutenu que l’engagement récent du Canada à la SDSG mondiale, y compris l’appui aux soins d’avortement, demeurerait intact.

Le Parti libéral n’a pas exprimé son appui à l’atteinte de la cible mondialement acceptée de 0,7 % du RNB pour l’aide au développement, mais il a appuyé les contributions actuelles à ce budget, qui s’élèvent à 0,26 % du RNB – soit le plus faible taux des pays du G7.

En revanche, le NPD s’est engagé à réinvestir dans l’aide au développement afin d’atteindre la cible de 0,7 % d’ici une décennie – et le Parti vert s’est engagé à la même cible, mais sans échéancier. Le Bloc Québécois a exprimé son appui continu à la SDSG dans le monde, mais n’avait pas de plan pour augmenter l’aide canadienne.

Tout en restant vagues quant aux finances, les partis ont convenu que le Canada devrait continuer de défendre les droits de la personne dans le monde, y compris les droits des personnes LGBTQI2+ et des femmes, et poursuivre ses efforts pour atteindre les Objectifs de développement durable de 2030.

À l’heure actuelle, la « Politique d’aide internationale féministe du Canada » (lancée en 2017) doit s’appuyer sur un cadre solide pour que l’aide canadienne joigne les organismes féministes et pour les droits des femmes et des jeunes, et contribue réellement à accroître l’égalité des genres. En collaboration avec nos partenaires canadiens et internationaux, nous continuerons de responsabiliser le gouvernement face à ces engagements.

Nous intensifierons nos efforts pour que l’engagement canadien annuel de 1,4 milliard $ en aide au développement, dont 700 millions $ pour la SDSG, soit investi dans les domaines les plus négligés de la SDSG – c’est-à-dire les soins contraceptifs, les soins d’avortement, la SDSG des adolescent-es et le plaidoyer en SDSG.

Assurance-médicaments universelle : 

L’assurance-médicaments a été un enjeu important de la campagne électorale. Nous avons travaillé à obtenir l’engagement de tous les partis à un régime d’assurance-médicaments complet, universel et à payeur unique – la meilleure façon de rendre la couverture accessible aux personnes les plus marginalisées. Pour améliorer la santé sexuelle de tous les individus, nous avons demandé aux partis de prioriser les médicaments et dispositifs de SDSG, y compris la contraception, les médicaments essentiels à la santé des personnes trans et les médicaments contre le VIH.

Le NPD a présenté un plan de couverture universelle complète d’ici 2020, incluant les soins contraceptifs. De la même façon, le Parti vert s’est engagé à appuyer la SDSG dans l’assurance-médicaments et à établir un plan provisoire pour combler les lacunes en matière de soins contraceptifs. Les libéraux se sont engagés à mettre en œuvre graduellement l’assurance-médicaments universelle, jusqu’à une couverture complète d’ici 2027, qui inclura les contraceptifs et d’autres médicaments et dispositifs de santé sexuelle et génésique. Le Bloc Québécois a déclaré qu’il retirerait le Québec (déjà doté d’un régime public provincial) de tout régime national d’assurance-médicaments. Les conservateurs n’ont pas appuyé l’assurance-médicaments universelle et à payeur unique et n’ont pas mentionné les besoins de SDSG dans ce contexte.

Éducation complète à la sexualité :

Nous avons été déçus de l’absence de leadership pour l’éducation à la sexualité, dans la campagne électorale.

L’état de l’éducation à la sexualité est pitoyable, à travers le Canada. La plupart des jeunes reçoivent une éducation sexuelle inférieure aux normes, inégale et/ou mal enseignée, ce qui conduit à de mauvais résultats de santé, à la discrimination et à un manque général de bien-être émotionnel chez les jeunes. Le Canada a besoin d’un leadership fédéral solide. L’éducation est un champ de compétence provinciale, mais le gouvernement fédéral peut jouer un rôle dans l’amélioration de l’éducation à la sexualité – nous lui avons déjà fait part de nos recommandations.

Bonne nouvelle : quatre des cinq principaux partis ont répondu à notre sondage électoral sur l’éducation à la sexualité. Les verts, les libéraux et les néo-démocrates ont tous exprimé des degrés similaires d’appui et d’appréciation à l’égard de l’éducation à la sexualité; le NPD s’est engagé à collaborer avec les provinces à améliorer l’éducation à la sexualité, et le Parti vert a explicitement dit qu’il financerait des programmes communautaires d’éducation à la sexualité. Ces deux partis se sont également engagés à défendre l’éducation à la sexualité dans l’éventualité où des provinces tenteraient de rétrograder leur programme ou s’attaqueraient à son accessibilité dans les écoles. Les libéraux ont reconnu que l’éducation relève des compétences provinciales, mais ont fait valoir leurs efforts pour réduire les taux d’ITS à travers le pays. Le Bloc Québécois soutenait l’éducation à la sexualité, mais s’opposait à l’intervention du fédéral dans les questions provinciales.

Nous continuerons d’exiger un leadership fédéral sur l’éducation à la sexualité. L’éducation sexuelle complète et de qualité est un droit humain de toutes les jeunes personnes.

Droits des travailleuse(-eur)s du sexe :

Près de cinq ans après la recriminalisation du travail du sexe par la Loi sur la protection des collectivités et des personnes victimes d’exploitation, les travailleuse(-eur)s du sexe et leurs allié-es attendent encore des actions – y compris l’abrogation de cette loi. Entre-temps, ces personnes continuent de subir de graves préjudices et de la discrimination résultant directement de la Loi.

Le travail du sexe n’a pas été un enjeu majeur, mais a quand même été évoqué en cours de campagne. Le Parti vert s’est engagé à réformer la législation actuelle dans une perspective de réduction des méfaits, en rendant l’industrie légale et publique. Le NDP a critiqué la loi actuelle, affirmant qu’elle viole les droits des travailleuse(-eur)s du sexe, mais il ne s’est engagé qu’à un examen juridique en consultation avec les travailleuse(-eur)s du sexe. Les libéraux n’ont pas mentionné le travail du sexe; il en va de même pour les conservateurs. Le Bloc Québécois s’est limité à déclarer qu’il examinerait l’enjeu avec toutes les personnes affectées.

Action Canada, en collaboration avec l’Alliance canadienne pour la réforme des lois sur le travail du sexe, a coordonné l’élaboration d’une déclaration de solidarité pour les droits des travailleuse(-eur)s du sexe, signée par plus de 130 organismes des quatre coins du pays. Le temps est venu de suivre le leadership des travailleuse(-eur)s du sexe, dans nos pressions pour inciter tous les leaders fédéraux à abolir les lois néfastes et discriminatoires qui ciblent les travailleuse(-eur)s du sexe.

Posté sur 2019-10-28